Un CCAS en Alsace :
« La conférence de Saint-Vincent-de-Paul est notre principal partenaire associatif »

Située dans la banlieue de Mulhouse, Riedisheim compte plus de 12 000 habitants. Martine Fournier, responsable du Centre Communal d’Action Sociale, et son élue Patricia Bohn, adjointe en charge des affaires sociales, de la solidarité et du logement, nous présentent les actions menées au cours de cette période de crise.

Quelles ont été les problématiques sociales liées au confinement ?

Martine Fournier : L’isolement existe toute l’année, mais il a été exacerbé pendant le confinement. C’est d’autant plus difficile quand on est en situation de précarité (financière, santé…) mais cela l’a également été pour les personnes âgées à qui nous avons demandé de rester à domicile, et qui de ce fait, indépendamment de problèmes de ressources ou de dépendance, se sont retrouvées très isolées.
Patricia Bohn : Concernant les personnes âgées, nous avons des familles éclatées dont les enfants ont quitté la région, les parents se retrouvent seuls face à cette crise. Pour les personnes en situation de précarité, les démarches se sont avérées compliquées : la Poste a été fermée, il n’y avait ni facteur, ni courrier, pas d’informations. Les personnes sans carte de crédit, voire en surendettement, ont été bloquées par la fermeture des banques.

 

Quelles actions avez-vous pu mettre en place ?

PB : La municipalité a recensé toutes les personnes âgées de plus de 70 ans. 

 

Ainsi 2 200 personnes ont pu être contactées individuellement, pour rompre cet isolement, prendre de leurs nouvelles et leur proposer de faire leurs courses.
MF : 200 personnes ont ainsi répondu favorablement. Une trentaine d’élus et de bénévoles se sont mobilisés pour leur livrer toutes les semaines leurs produits de première nécessité. Certaines personnes ont été appelées tous les jours tant elles se sentaient isolées.
PB : Ce sont des élus et des bénévoles qui ont fait les courses et qui téléphonaient. Mais ce sont des nouveaux bénévoles, des actifs confinés à la maison, qui ont voulu donner de leur temps personnel. La commune avait lancé à ce titre un appel dans la presse et sur les réseaux sociaux. La question qui va se poser avec le temps est la suivante : comment pérenniser ces services ? Nous avons une association, l’Entour’âge, qui accompagne déjà les personnes âgées, mais la moyenne d’âge des bénévoles est également élevée. Il va falloir retrouver des jeunes retraités qui peuvent y consacrer du temps.

 

Beaucoup de structures associatives ont dû fermer à cause du confinement. Ce sont les CCAS qui ont pris le relais un peu partout en France. Comment avez-vous vécu cette situation dans votre commune ?

MF : Nous avons une épicerie solidaire communale, gérée par le CCAS, qui fonctionne grâce à l’implication d’une quarantaine de bénévoles et notamment des Vincentiens.

La Conférence de Saint-Vincent-de-Paul est notre partenaire au quotidien, c’est la principale association de la commune avec qui nous travaillons au sein de l’épicerie.
PB : Mais comme la plupart des bénévoles sont âgés, pour les protéger, nous leur avons demandé de se mettre en retrait. Ce sont les services du CCAS avec l’aide de certains employés communaux qui ont pris le relais. Pour compenser la fermeture de la Banque alimentaire du Haut-Rhin, le CCAS a augmenté les achats nécessaires à l’approvisionnement de l’épicerie.
MF : En effet, nous avons compensé en termes de moyens financier et humain afin que les bénéficiaires ne soient pas lésés. Au niveau du CCAS, nous ne pouvons plus recevoir sans rendez-vous, il faut adapter notre organisation d’accueil. En plus de nos actions, nous animions des ateliers pédagogiques à l’épicerie solidaire pour permettre justement de lutter contre l’isolement au quotidien. Et paradoxalement, pour des raisons sanitaires, nous ne pouvons plus utiliser cet outil. Tandis qu’avant la crise, nous essayions de créer du lien, nous devons aujourd’hui aborder de manière individuelle la question de l’isolement.

ET À LA SSVP ? 

« Tout le Conseil départemental
s’est mobilisé »

Aurélie Chatagnon est responsable de la communication du CD Loire Saint-Étienne. Elle témoigne de la réactivité des Conférences permettant de poursuivre les actions auprès des personnes vulnérables.

« À aucun moment, je n’ai été tentée par le désespoir. Quand nous avons lancé notre appel aux bénévoles et senti l’élan autour de nous, cela nous a donné beaucoup de courage pour aider toutes ces familles que nous ne pouvions abandonner. Dès le début de la crise, tout le Conseil départemental s’est mobilisé : 14 Conférences sur 17 ont pu maintenir leurs activités. Nous avons lancé des initiatives permettant d’accompagner jusqu’à 300 familles par semaine dans notre local. Restant toujours à l’écoute des besoins, nous avons rebondi assez vite. J’ai créé une mission sur la plateforme d’aide de la réserve civique #jeveuxaider. Énormément de nouveaux bénévoles, des étudiants, des personnes au chômage partiel ou en télétravail, mais avec du temps, sont venus nous prêter main forte. J’ai également lancé un appel à l’aide par des vidéos largement relayées sur Facebook et par l’enregistrement d’une émission de radio sur RCF. Grâce à cela, les bonnes volontés continuent de se manifester !
Notre local poursuit sa mission de préparation et de distribution de colis alimentaires pour les familles envoyées par la mairie ou les autres associations qui sont fermées actuellement. Un jour par semaine, le local accueille des étudiants, car la crise a accentué le phénomène de précarité pour eux aussi. Enfin, nous accueillons une autre association dans notre local, elle peut ainsi distribuer des chèques services aux personnes vivant dans des squats.
Pour conclure, je dirais que la force d’une association, c’est de savoir mixer les âges et les profils de ses bénévoles pour augmenter sa capacité de réaction. Et c’est la richesse de notre Conseil départemental : nous avons des équipes plus âgées avec une expérience de vie plus importante qui nous aide à nous construire, et une équipe assez jeune, active qui nous donne cette force de continuer. »

SUITE DU DOSSIER "PANDÉMIE : ÊTRE PRÉSENTS, TOUT SIMPLEMENT "

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